L'art de la méditation, par Jean Klein

Jean KLEIN, l'un des plus grands maîtres spirituels du XXième siècle.(1912-1998)originaire d'Europe centrale, s'inscrivant dans la tradition de l'Inde de l'Advaita Vedânta et du shivaïsme du Cachemire.

Son enseignement a largement contribué à ouvrir la sensibilité occidentale à la non-dualité et à l'éveil.

Musicologue et médecin de formation, il est l'auteur de plusieurs ouvrages en français et en anglais. Il était également professeur de yoga. Son enseignement a influencé de nombreux enseignants contemporains comme Eric Baret, Jean Bouchart d'Orval, Francis Lucille, Rupert Spira, ainsi que Jean-Louis Forêt, enseignant du yoga de la non-dualité sur Besançon en Franche-Comté.

 

Jean Klein dans ces dialogues magnifiques essaye de nous éveiller à la conscience non-duelle derrière les pensées, au silence au-delà des mots, au sans forme au-delà des formes.

 

Très grand connaisseur des traditions spirituelles indiennes, et principalement de l'Advaita Vedânta, Jean Klein sait avec tact, force et pédagogie tourner notre attention                                                                                      vers l'intériorité

 

 

 "La méditation, comme nous l'entendons est au fond, un laboratoire pour faire connaissance avec soi-même,

connaissance avec ce lâcher-prise de toute énergie en mouvement."

 Jean Klein

 

ENTRETIEN SUR LA MEDITATION

 

- Monsieur Klein, depuis quelques jours, j'ai des difficultés pour méditer. Quand je crois que le corps est détendu et que je regarde les pensées, alors que je crois être encore lucide, je plonge en avant. Cela produit un choc violent et je dois tout recommencer. Que se passe-t-il ?

 

- Jean Klein : il faudrait rester très éveillé quand vous passez le corps en revue. Il faut laisser se résorber toutes les résistances et quand toutes les résistances sont consumées - ce qui prend d'ailleurs beaucoup de temps - votre attention qui est encore volitive et où il y a des éléments que vous voulez diriger, éliminer, situer, est encore habitée par un dynamisme de vouloir faire.

 

Quand la méditation perd tout son dynamisme, il y a un lâcher-prise qui se fait, à un moment donné. Il ne faudrait pas que vous vous perdiez dans le vide de votre corps, ni dans la perception. La méditation n'est pas faite en vue de purifier ou de vider le corps. Le corps est uniquement un objet pour pointer vers le sujet.

 

La méditation doit vous amener à l'autonomie totale.

Quand votre corps est détendu, vacant, il ne faudrait pas vous perdre, ni plonger dans cette vacuité

 

- C'est là que je m'écroule, justement !

 

- Le but n'est pas le corps...

 

- Il faudrait, avant tout, arriver à l'élimination de toutes les réactions, de toutes les résistances.

Vous allez trouver une immense résistance dans la région frontale. Il ne faudrait pas fixer toutes ces tensions, mais les laisser complètement libres ; il faut presque laisser couler toute la tension frontale en arrière comme un ruisseau, loin de la région cervicale. A tout prix, il faut quitter tout ça !

 

Vous sentez aussi la région de la nuque habitée par tous ces encombrements et ensuite vous les laissez se perdre complètement dans le cœur. Ça part du front et ça se perd dans le cœur.

 

Vous serez alors libre de tous ses parasites.

La méditation est un très grand art.

 

Il ne s'agit pas de méditer sur quelque chose parce que, là, il y a encore un méditant et une chose méditée.

La méditation c'est l'attitude profonde, en nous, qui n'est habitée par aucun motif.

 

Il faut surtout, ne pas avoir de but et constater constamment que nous avons toujours l'habitude de "vouloir faire". L'attitude juste c'est de ne pas "vouloir faire" ni "défaire".

 

Il faut avoir cette profonde conviction que la Perfection est là, en nous !

 

Nous devons laisser se détacher ce qui n'est pas la Perfection. Il n'y a rien à diriger mais seulement constater, en nous, tout ce monde parasitaire.

 

La simple constatation est transformation.

La constatation est élimination.

 

 La Sainte-Baume, 16 juin 1979.